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The Closer : Brenda Leigh Johnson, féminine et féministe ?

La série The Closer dépeint avec réalisme et humour les réactions machistes et le sexisme ordinaire auquel doit faire face Brenda Leigh Johnson, chef-adjoint de la police de Los Angeles (LAPD). Toute la première saison a pour thème ces rapports de force et la manière dont la nouvelle dirigeante de la brigade des Enquêtes prioritaires s’impose dans un monde d’hommes. Mais le principal intérêt de l’héroïne créée par James Duff est qu’elle n’est pas l’une de ces femmes flics en pantalon courant après les criminels. Avec ses robes à fleurs et ses tailleurs vintage, le chef Johnson donne une image « féminine » du pouvoir.

Parmi les premières femmes flic on pourrait citer le trio des Drôles de dames (1976-1981), série qui pour mettre en scène des personnages féminins devait les placer sous la tutelle d’un homme mystérieux dont on ne voit jamais le visage (le fameux Charlie du titre original Charlie’s Angels). Dans le générique, elles sont présentées comme des fonctionnaires de police qui ont dû choisir de travailler dans le privé car elles étaient cantonnées à des poses subalternes.

Des blasers de Cagney et Lacey…

Dans les années 1980, deux scénaristes femmes créent la première série où les femmes flic ne sont pas simplement un prétexte pour mettre en scène de jolies filles : Cagney and Lacey. La blonde Christine Cagney incarne la jeune femme ambitieuse et célibataire tandis que la brune Mary Lacey est une femme mariée avec enfant.

Difficile de dire si Barbara Avedon et Barbara Corday s’attendaient à réaliser un feuilleton influençant l’image de la femme à la télévision. En tout cas ce duo de femmes flics permettait aux téléspectatrices de s’identifier à des figures fortes et de se faire une autre image de la femme au travail. C’est l’une des rares séries à mettre des policières en guise de personnages principaux.

Par la suite, on trouve d’autres figures féminines mais surtout en tant que protagoniste secondaire comme le lieutenant Anita Van Buren (jouée par S. Epatha Merkerson), femme noire et dirigeant une brigade de police dans la série New York : Police judiciaire (Law and Order) entre 1993 et 2010.

D’autres fonctionnaires de police sont obligées de partager le premier rôle avec un homme. Ainsi Olivia Benson (Mariska Haritay) forme un duo avec le détective Elliot Stabler dans New York : Unité spéciale (depuis 1999), tandis que Kate Beckett est la muse de l’écrivain Castle dans la série du même nom (depuis 2009).

La particularité vestimentaire de toutes ces femmes réside dans le fait qu’elles soient généralement en pantalon pour pouvoir courir après les criminels. Si les blasers et autres vestes longues semblent être les indispensables de la garde-robe des policières dans les années 1980-1990, ils ont fait place au blouson de cuir depuis les années 2000. De là à croire qu’il faut s’habiller comme un homme pour faire partie de la police ou être crédible, il n’y a presque qu’un pas.

Dans les autres séries policières mettant en scène des femmes, on retrouve cette sorte d’uniforme de la femme flic. Certes, cela correspond sans doute plus à la réalité du métier. Mais cela ancre aussi l’idée qu’une femme d’apparence « féminine » ne peut pas être efficace dans ce métier plutôt masculin.

Aux robes à fleurs de Brenda Leigh Johnson

Dans The Closer, on retrouve enfin une femme flic en rôle titre sans qu’elle ait besoin de former un tandem avec un partenaire masculin. Brenda Leigh Johnson dirige une brigade d’hommes d’où la seule autre femme, Irène Daniels (Gina Ravera), a été contrainte à changer de section.

N’ayant pas vraiment besoin de traquer les criminels sur le terrain, le chef adjoint peut se permettre des tenues plus féminines et les épisodes où Brenda porte un pantalon se comptent presque sur les doigts de la main.

Greg LaVoi qui s’occupe des costumes de The Closer tient visiblement beaucoup à ce que Brenda arbore de jolies robes à fleurs évoquant le sud des États-Unis. Au lieu de porter le blazer ou le blouson en cuir, Brenda arpente les rues en tailleur vintage, en twin-set et en talons qu’elle enlève régulièrement car elle a mal aux pieds ou besoin de courir. Sa garde-robe colorée tranche avec les scénarios généralement très noirs de la série.

Plus encore, si le lieutenant Colombo est connu pour son pardessus beige élimé, Brenda s’affiche régulièrement avec des trench coat rose, signe de sa féminité. Elle possède également une série de petits cardigans courts de couleur rose et orange. Mais surtout, elle a un somptueux cardigan beige long et confortable. Elle le porte dès le pilote et on le retrouve à chaque fois qu’elle doit faire face à une situation personnelle difficile. Elle le cherche d’ailleurs désespérément à la suite d’un déménagement où elle pense l’avoir perdu.

Tout ceci n’a l’air de rien mais cette garde-robe donne à Brenda un côté très féminin très « normé » qui fait contraste avec sa position réelle et son vrai caractère (elle n’est ni douce ni inoffensive). C’est un peu comme si la garde-robe affichait les signes de la féminité pour contrebalancer le pouvoir détenu par l’héroïne en tant que chef de la brigade des Enquêtes prioritaires. L’ensemble contribue en tout cas à casser une certaine image de la femme. Ce n’est parce que l’on n’est pas en tailleur pantalon qu’on n’est pas efficace au travail.

La première partie consacrée à The Closer est toujours ici.

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