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Hatsune Miku, l’idol de SEGA

En décembre 2010, le site japonais de Yahoo a publié les résultats d’un sondage établissant quel était le personnage de jeu vidéo le plus populaire. En première position, on retrouve sans trop de surprise Mario. Mais saviez-vous que juste derrière, arrive Hatsune Miku, personnage de Project Diva, jeu d’arcade et de rythme de SEGA ? Oui, vous avez bien lu. Il ne s’agit pas de Sonic mais bien d’un personnage totalement inconnu en France. Laissez-nous vous présenter l’idol des jeunes.

Monster Hunter de Capcom avait permis de faire décoller les ventes de la PSP au Japon. Pour la PS Vita, privée de cette licence disponible en exclusivité sur Nintendo 3DS, Sony s’est appuyée sur Hatsune Miku : Project Diva f de SEGA pour booster les ventes.

Lors de la première semaine de lancement, le bundle comprenant une PS Vita et le jeu s’est vendu à cinquante mille exemplaires, quintuplant les ventes de la console ; et cent cinquante-neuf mille cinq cent quatre-vingt-douze exemplaires du jeu se sont écoulés en une semaine.

Mais avant d’être le system seller de Sony, Miku est avant tout un personnage fictif, une chanteuse et une voix de synthèse créées pour un logiciel de musique de Yamaha : Vocaloid.

 Du virtuel au réel

Tout au début, Vocaloid est un projet de recherche d’Hideki Kenmochi, qui travaille alors dans une université espagnole. Comme le mot valise l’indique (« Vocal » + « Android »), il s’agit de recréer la voix humaine.

La compagnie Yamaha, célèbre pour ses instruments de musique, décide d’investir dans le projet pour élaborer un synthétiseur vocal permettant aux musiciens de composer les mélodies et d’y ajouter les voix de synthèse pour réaliser des titres complets. Plus besoin de musicien ni de chanteur pour obtenir une chanson !

Le premier logiciel sort en 2004 et enthousiasme surtout les musiciens et les amateurs éclairés. Plusieurs sociétés conçoivent des produits à partir de Vocaloid avec des voix spécifiques. Pour donner corps à la voix de synthèse, des personnages en 3D sont créés et la société Crypton Future Media lance Kaito (voix masculine) et Meiko (voix féminine).

Avec Vocaloid 2, Crypton agrandit son casting de chanteurs virtuels. Parmi eux, il y a la fameuse Hatsune Miku, jolie fille aux longs cheveux verts et à la jupette courte. Elle devient rapidement populaire et les nombreux illustrateurs amateurs du pays du Soleil-Levant la mettent en scène dans diverses bandes dessinées (dôjin), illustrations et cosplays.

Pendant que les « Vocaloid P » (Vocaloid producer, ou créateur utilisant le logiciel Vocaloid pour élaborer sa chanson) alimentent une banque de données musicale hallucinante et de qualité, d’autres artistes amateurs réalisent des clips vidéo mettant en scène les idol et les diffusent sur Nico Nico Dôga, le YouTube nippon.

Le succès est tel que de vrais concerts sont organisés : devant un public conquis, les idol sont projetées sur scène sous forme holographique. J’ai assisté à un miniconcert donné sur le stand de SEGA lors d’un salon de l’arcade à Tokyo et le spectacle est bluffant.

Émergeant du noir, une créature humanoïde chante et danse dans une foule ravie. Je ne sais pas ce qui est le plus fascinant : la prouesse technique au niveau de la mise en scène ou la passion qu’on lit dans les regards du public.

Miku plus forte que Sonic ?

Les phénomènes Vocaloid et Hatsune Miku sont tels que Crypton s’allie à SEGA pour sortir des jeux de rythme reposant sur les chansons créées en partie par le public.

En appuyant en rythme sur les bonnes touches, les joueurs peuvent entendre la chanson sans accroc et débloquer des bonus, par exemple changer la tenue ou la coiffure de l’idol. Et comme garçons et filles adorent jouer à la poupée avec Miku (certes, pas pour les mêmes raisons), le jeu est condamné au succès.

Après un premier titre sur PSP en 2009, SEGA poursuit en le portant sur PS 3 et en borne d’arcade. Grâce à la carte SEGA, les joueurs peuvent sauvegarder leurs données et leur progression quelle que soit la borne sur laquelle ils jouent.

Du coup, les fans peuvent très bien faire quelques parties en arcade avant de rentrer chez eux après leur journée de travail. Sur PS 3, on peut même voir le personnage en 3D pour être plus « proche » de lui !

Le succès des jeux Hatsune Miku : Project DIVA ne se démentant pas au fil des ans, des spin-offs sont créés sur 3DS (Hatsune Miku and Future Stars : Project Mirai) et iOS (Miku Flick).

Selon les mauvaises langues, Sony aurait quelque peu forcé la main de SEGA pour que le volet de 2012 sorte sur la PS Vita. Pour ce Project Diva f, les développeurs ont ajouté un élément de gameplay utilisant l’écran tactile de la console pour le distinguer des précédents opus sur PSP : il faut désormais jouer avec des étoiles en les lançant au bon moment et au bon endroit.

Mais la PS Vita n’étant toujours pas bien installée sur le marché japonais, SEGA semble ne pas vouloir sortir un autre volet sur cette console. Pour le moment, les fans attendent la version PS 3, prévue en mars 2013.

La grande réussite de Crypton et SEGA en ce qui concerne Hatsune Miku est d’avoir laissé faire les fans. En 1996, la société HoriPro avait déjà essayé de créer de toutes pièces une idol avec une biographie et un catalogue de chansons : Kyoko Date ou DK96 (pour Digital Kid 1996).

La jeune fille de seize ans, constituée de quarante mille polygones et dotée d’une petite dizaine de papas designers pour modéliser son visage, est censée vivre en banlieue de Tokyo avec ses parents.

Cette première idol virtuelle aux traits photoréalistes est à la fois chanteuse, mannequin et actrice. Mais passé le premier temps d’étonnement, elle ne dure pas.

Au contraire, Hatsune Miku n’appartient plus vraiment ni à Crypton ni à SEGA, lesquels n’ont fait que la mettre à disposition du public qui crée des contenus sur elle, avec elle, pour elle.

En dehors des chansons réalisées avec le logiciel Vocaloid, il y a les récits, recueils de poésies, bandes dessinées, illustrations, clips vidéo, costumes pour le personnage dans les jeux, poupées et autres figurines, goodies divers à son effigie.

Hatsune Miku vit par elle-même et elle est d’une certaine façon une icône bien plus vivante que ne l’a été le hérisson bleu.

Fiche d’identité virtuelle


  • Nom : Hatsune (« premier son » en japonais)
  • Prénom : Miku (« futur » en japonais)
  • Âge : 16 ans
  • Taille : 1,58 m
  • Poids : 42 kg
  • Musique favorite : j-pop, dance pop
  • Voix réelle : Saki Fujita, actrice dont la voix a été samplée pour le logiciel
  • Character designer : Kei
  • Première apparition : 31 août 2007 dans le pack de Crypton Future Media pour le logiciel Vocaloid 2
  • Nombre de chansons : plus de trois mille créées par les fans pour les fans, en vente sur iTunes et Amazon.
  • Premier concert face à un public réel : Tokyo le 9 mars 2010.
  • Où la voir en spectacle : elle donne des miniconcerts réguliers à Joypolis, parc d’attractions de SEGA à Tokyo.
  • Le 31 août 2013, l’un de ces concerts avait été retransmis en différé au Mega CGR de Torcy en région parisienne.

Cherchez l’idol

Au Japon, le terme « idol » désigne une chanteuse populaire bien souvent « créée » par des producteurs de talent pour un marché de la musique ultraconcurrentiel. Il semble qu’à l’origine de cette utilisation du mot idol, on trouve l’engouement du public pour un film français mettant en scène la chanteuse Sylvie Vartan : Cherchez l’idole(Michel Boisrond, 1964).

Les idol sont également liées à la culture otaku par le biais de personnages de dessins animés dont le plus emblématique est Lynn Minmay, idol dans la série et le film Super Dimension Fortress Macross (Shôji Kawamori, 1982).

Dans ce space opera dont le character design a été confié à Haruhiko Mikimoto, le cœur du héros balance entre cette idol et une femme militaire. À la fin, il délaisse la chanteuse dont la voix et la musique permettent de vaincre les forces extraterrestres.

Mais je vous laisse regarder cet anime ou sa version américanisée (Robotech) pour mieux comprendre… La série a bénéficié de plusieurs suites mettant toujours plus ou moins en scène des amours triangulaires incluant une chanteuse.

Dans la série d’OAV Macross Plus (Shôji Kawamori, 1994), l’idol est en réalité une intelligence artificielle du nom de Sharon Apple. Lors des concerts, un hologramme la représente en train de chanter et danser.

Sa particularité est de changer de forme pour correspondre au mieux aux désirs de la personne qui la regarde. Les concerts de Miku sont comme une sorte de concrétisation dans le monde réel de cette Sharon Apple issue du dessin animé.

La version arcade de Hatsune Miku Project Diva est sortie en 2011 avec le système RingEdge de SEGA. Les boutons de la PSP sont remplacés par une ligne de quatre boutons que l’on doit maintenir enfoncés plus ou moins longtemps.

Il est aussi possible d’appuyer sur plusieurs boutons en même temps en fonction des musiques jouées. La progression du score est conservée lorsque les joueurs sont équipés d’une carte spécifique (et payante) par le biais de DIVA.net, les bornes étant connectées à ce site Internet.

On trouve des bornes en dehors du Japon mais seulement en Asie (Taiwan, Hong Kong, Singapour, Macao et Corée du Sud).

Mais pour le public français, il reste Hatsune Miku: Project DIVA F™ sur Playstation®Network. Il s’agit de la première sortie console en occident ayant pour vedette la chanteuse virtuelle Hatsune Miku. Alors profitons-en !

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