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Une rentrée scolaire au Japon avec Tôru Honda (Fruits Basket)

Pendant que vous vous plaignez encore de la rentrée qui arrive trop vite pour gâcher vos vacances, les Japonais ont déjà entamé l’année scolaire depuis le mois d’avril ! Suivons leur parcours en compagnie de Tôru Honda et faisons une rentrée scolaire au Japon.

Tôru est presque une lycéenne comme les autres. C’est l’héroïne de Fruits Basket, élu meilleur dessin animé en 2001. Comme dans bien des shôjo et des shônen, l’intrigue se déroule dans le cadre quotidien des adolescents, public ciblé, afin de faciliter l’identification des spectateurs aux personnages principaux.

On peut ainsi suivre avec elle l’évolution d’une année scolaire dans un établissement japonais.

Pas de cantine mais une salle commune où manger le repas préparé la veille

En septembre, Tôru rentre au lycée après un mois de vacances d’été. Elle se rend à l’école cinq jours sur sept, pour suivre six heures de cours en moyenne.

À midi, elle n’a que 40 minutes pour prendre son bento, plateau repas qu’elle a préparé la veille ou le matin même. Elle déjeune ainsi avec les autres élèves dans la salle de cours.

En fait les élèves japonais ne se déplacent pas de salles en salles comme le font les Français. Ils sont dans une salle fixe qu’ils doivent ranger et nettoyer eux-mêmes.

C’est une manière d’apprendre à vivre en communauté et à respecter l’espace commun. (sauf ceux qui nécessitent un matériel spécial) Un des préceptes qu’on y apprend est le kiritsu-rei-chakuseki, c’est-à-dire se lever, saluer et se rasseoir face au professeur, sans quoi le cour ne peut débuter ou s’achever.

L’enseignement de la discipline et des normes sociales fait partie intégrante de l’école japonaise.

Il y a des cours de cuisine au Japon

Après sa journée de cours, Tôru se rend à son petit boulot qui s’achève souvent vers 23h. Elle est femme de ménage dans un grand immeuble de bureaux. Il lui faut en effet payer les frais de scolarité de son lycée public qui s’élève à environ 90 €.

Si elle avait été dans le privé les tarifs auraient été dix fois plus importants. Le système japonais repose sur une première sélection par l’argent.

Les études coûtent chères et ce sont souvent les familles les plus riches qui peuvent permettre à leur enfant de faire des études brillantes pour ensuite obtenir les meilleurs emplois.

Travail après l’école pour se payer ses études au lycée

Non seulement l’école publique est payante mais il faut aussi avoir de quoi régler les juku (cours de soutien le soir) ou les yobikô (écoles préparatoires pour bachoter les concours d’entrée à l’université).

Une majorité de lycéens et de collégiens sortent de leur établissements pour aller étudier durant deux à trois heures dans ces écoles privées le soir afin d’améliorer leurs résultats. Les juku existent aussi lors du cycle élémentaire pour préparer les élèves à l’entrée au collège.

Dans Fruits Basket, Tôru est trop pauvre pour se payer des cours du soir et c’est Yûki Soma qui l’aide à préparer ses examens gratuitement. C’est pourquoi elle est si honteuse d’avoir été recalée à presque tous ses contrôles.

Travail, travail, travail

Lorsque la série commence, Tôru est en seconde. Mais comme les Japonais comptent dans le sens inverses les trois années de lycée, il est inscrit 1-D sur les panneaux de sa salle de cours.

Lorsqu’elle passe en première l’année suivante (milieu de la série), elle se retrouve dans une salle notée 2. La terminale correspond à la classe 3.

Malgré leurs piètres résultats, Tôru comme Hana, son amie qui est d’un niveau encore plus faible, passent en classe supérieure. Le redoublement est une pratique assez rare au Japon car ce qui compte ce n’est pas la somme de connaissances reçue durant une année, mais celle que l’on acquiert pendant toutes les années d’un cycle scolaire.

En effet, ce qui compte ce n’est pas le passage en classe supérieure, mais l’obtention d’un concours d’entrée dans un bon lycée ou dans une université réputée.

Ainsi, dans le manga Fushigi Yûgi, les héroïnes se préparent à passer le chûgakkô-shiken pour briguer un bon lycée. Dans Love hina, Chobits et Maison Ikkoku, les personnages principaux bachotent le daigaku-shiken (concours d’entrée à l’université) qu’ils ont déjà raté plus d’une fois.

Ils visent Todai, la prestigieuse université de Tôkyô, qui avec Waseda ou Keiô sont considérées comme les plus cotées car elles sont les mieux classées dans les recrutements.

Les concours d’entrée sont les deux seuls réels objectifs scolaires. Les réussir ou les rater détermine non seulement la scolarité mais aussi le futur emploi dans la vie active.

La compétition lors de la période des concours est si stressante que l’on parle de l’enfer des examens : juken jigoku. Une expression courante yontô goraku indique que si l’on ne dort que 4 heures on peut réussir le concours, alors que si l’on a dormi pendant 5 heures l’examen est raté.

En général les concours se font à partir de tests du type QCM (questions à choix multiples). Parmi les matières concernées on trouve entre autre le japonais, les maths et l’anglais.

Si les lycéens ratent le concours d’entrée, ils peuvent le repasser en candidat libre, ce qu’on appelle un rônin (samouraï sans maître). Dans certaines universités cotées de Tôkyô et de Kyôto 65 à 75% des étudiants sont d’anciens rônin.

Une fois le concours acquis, les étudiants n’approfondissent pas vraiment leur connaissance dans leurs études supérieures, car de toutes façons les entreprises japonaises entendent former elles-mêmes leurs nouvelles recrues sur le long terme.

Et vu comme ils ont dû travailler pour entrer dans l’université, ils bénéficient d’une sorte de zone de transition avec le monde du travail, durant laquelle ils peuvent enfin se reposer… un peu.

Alors qu’en France nous avons les vacances de la Toussaint pour couper le long tunnel des cours au Japon, les élèves doivent attendre les vacances de fin d’année pour pouvoir souffler un peu pendant les quinze jours de repos. Et encore…

S’ils sont en dernière année de lycée ils doivent préparer le daigaku-shiken et les examens de fin d’année qui se déroulent en janvier. Ce n’est pas pour rien qu’au Japon Noël n’est pas un fête des enfants mais des amoureux.

Les élèves comme les étudiants n’ont que peu de temps à consacrer à cette festivité. Ils doivent travailler pour réussir les deux derniers mois de l’année scolaire janvier et février. Et en mars, des vacances bien méritées !

Retour du printemps et des cours

Le premier avril n’est pas le jour du poisson mais celui de la rentrée. Cette date a été adoptée en 1872 par le ministère de l’éducation japonais qui s’est calqué sur l’ancien système scolaire français qui faisait aussi débuter l’année à cette période.

Un jour entier est consacré à l’accueil des nouveaux élèves lors d’une fête où les parents sont conviés. Dans Fruit Basket, Momiji et Hatsuharu ont ainsi été accompagnés par leur cousin Shigure, qui en a surtout profité pour regarder les jolies lycéennes.

Après six ans d’école élémentaire et trois ans de collège, l’école n’est plus obligatoire mais une majorité d’élèves poursuivent leur études au lycée.

Momiji porte un sailor fuku, uniforme de fille, mais il a tout de même un short et non une jupe

L’arrivée de Momiji et Hatsuharu ne passe pas inaperçue et ils sont immédiatement pris en grippe par le président des lycéens car ils ne s’intègre pas bien dans le moule général. Il faut dire que Momiji a adopté l’uniforme des filles au lieu de celui des garçons. Il trouve que le sailor fuku ou seifuku lui sied mieux !

Cette pratique qui impose le port d’un uniforme symbolisant l’établissement provient du système anglais que les Japonais ont copiés lors de l’occupation américaine après la seconde guerre mondiale.

C’est d’ailleurs en 1947 que furent décrétées la «Loi fondamentale sur l’éducation» et la «Loi sur l’éducation scolaire» qui régissent encore en grande partie le système scolaire actuel.

Le seifuku est parfois fétichisé et peut même être stylisé par de grand nom de la mode afin d’attirer les fashion victims dans l’établissement.

Si Tôru porte la jupe plissée de manière très courte, son amie Hanajima a pris une longueur intermédiaire et Alisa en a une très longue, ce qui correspond bien à son image de yankee : une fille un peu voyou, qui, dans la série, n’hésite pas à frapper avec sa barre de fer.

L’importance de l’image et de la cohésion est telle que les élèves qui se distinguent, ne seraient-ce que par un petit détail, deviennent rapidement victimes de brimades.

Ce harcèlement (ijime) a frappé Tôru qui a été la tête de turc de ses camarades. C’est notamment illustré par le jeu nommé « fruit basket » : tout le monde a reçu un nom de fruit sauf Tôru qui a été nommée onigiri (boule de riz) et a été exclue du jeu.

C’est à cause de cette expérience malheureuse qu’elle est à même de comprendre Kisa, une jeune collégienne qui a été tellement persécutée qu’elle en a perdu l’usage de la parole et qui refuse désormais d’aller à l’école.

Quant à Hatsuharu, à force d’être moqué, il en est devenu très violent et passait son temps à bastonner ses camarades (Black Haru). Ces cas ne sont pas isolés et de nombreux enfants japonais refusent d’aller à l’école élémentaire et au collège. Il y avait déjà 62 228 cas d’allergie à l’école et 10575 incidents violents (ijime compris) en 1996.

Réforme et natalité

En 2002, une grande réforme de l’éducation nationale japonaise a été entreprise afin de développer la créativité et l’autonomie des élèves.

Dans le cadre de ce yutori kyôiku, les programmes sont allégés et les problèmes comportementaux devraient être mieux pris en compte afin d’assurer l’apprentissage d’une vie commune. Malheureusement, cette réforme est souvent critiquée comme étant la cause d’une baisse de niveau dans les résultats scolaires… 

L’autre problème rencontré est la baisse global du nombre d’élèves et d’étudiants, due à la diminution de la natalité. Bien des universités, des yobikô et des juku ont du mal a recruter suffisamment d’élèves pour être rentables et les dépôts de bilan ne sont plus rares.

Enfin, il faut ajouter à ce tableau la situation économique globale. Le temps de la compétition acharnée pour les universités semble bien révolu et d’autant plus que la crise économique vient perturber le système scolaire ultra compétitif qui assurait un emploi à vie dans un poste plus ou moins bien rémunéré.

Il nous reste alors l’image d’Épinal de toutes ces lycéennes en uniforme que l’on retrouve dans les anime. Et parmi celles-ci, je trouve que Tôru est de loin l’une des plus attachantes.

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