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Jeu vidéo

Guerre des consoles : la course à l’armement dans la pub

Dans les années 90, les pub pour consoles de salon rivalisaient les unes avec les autres dans des campagnes d’un goût parfois douteux. C’était à qui aurait la plus grosse… mémoire, résolution ou autonomie. Dans le cas de SNK, les publicités américaines jouaient avec une métaphore limpide afin de séduire adolescents et jeunes adultes.

Il y a une vingtaine d’années, pour contrer Nintendo et sa console familiale, beaucoup de constructeurs promouvaient leurs produits de manière agressive en s’adressant de façon « brut de décoffrage » à leur cœur de cible : l’adolescent masculin.

Aux États-Unis, Sega titrait ainsi « Genesis does what
Nintendon’t » : Genesis (nom de la console « megadrive » aux USA) accomplit ce que Nintendo n’est pas capable de faire. (Mais pour SEGA et la pub, rendez-vous plutôt ici)

De son côté, SNK propose des campagnes assez hilarantes, du moins pour le public du XXIe siècle qui les regarde au second degré.

Mieux que la mort qui tue

Il faut se tourner vers les États-Unis pour en avoir un bon exemple. En effet, la firme d’Osaka laisse la communication aux mains de Kent Russel, directeur marketing de SNK USA, dont l’objectif est de stimuler les hormones des jeunes yankees prépubères.

Il décide donc de revisiter le slogan de la marque
(« The Future is now ») et de l’associer à l’image d’un chien enragé qui vient de déchiqueter de sa puissante mâchoire une console blanche.

Inutile de gloser sur l’image, on aura compris qu’il s’agit de mettre en pièces la concurrence. Quant au slogan, il est… étrange : « Bigger, Badder, Better ». On pourrait traduire cela par « plus grand, plus méchant, plus mieux ! »

Je dis bien « plus mieux » et non « meilleur », car l’un des comparatifs anglais comporte une erreur : ce n’est pas « badder » mais « worse » qu’il aurait fallu utiliser.

Pourquoi diable mettre une faute aussi grossière dans une publicité ? Pour la rime ? Quoi qu’il en soit, le slogan et le chien marquent les esprits. Aussi Russel en fait-il un label destiné à figurer à la fois sur les jeux et les publicités.

Les autres campagnes bénéficient de la même imagerie très premier degré. Veut-on insister sur la puissance de la console qui permet de ramener les jeux d’arcade à la maison ? Pas de problème ! Voici une Neo Geo AES volant à travers la porte d’entrée d’une maison avec le label « Bigger, Badder, Better » dans le coin. La puissance, mon brave monsieur ! La puissance !

Kikitoudur

Au cas où tout ceci ne serait pas assez explicite, SNK se lance dans la publicité comparative et les métaphores douteuses. À l’image une petite saucisse face à un hot-dog rembourré de sauces et de condiments.

Au niveau du texte, le terme « weenie » désigne à la fois une saucisse et un appendice sexuel masculin de petite taille ou de garçon prépubère. Vous comprenez aisément à quoi le supplément de sauces peut faire penser. Jouer à la Neo Geo est donc « jouissif ».

Dernier exemple de pub pour console : une jeune femme accorte en improbable guêpière blanche se plaint d’être délaissée par son homme.

Celui-ci joue évidemment à la Neo Geo et l’image extraite du jeu Cyber-Lip laisse voir un monstre phallique pour suggérer l’érection monumentale du joueur en pleine action…

Le jeu et la créature existent réellement. Très inspiré de ContraCyber-Lips est un jeu d’action où l’on affronte des créatures extraterrestres et où l’on finit par vaincre un ordinateur réellement doté de lèvres métalliques.

Là encore, le plaisir vidéoludique et le plaisir charnel se confondent. Comme dans la plupart des campagnes de pub de l’époque, la console sert de substitut phallique.

Cet imaginaire masculin marque la pratique du jeu vidéo. C’est pourquoi les filles ne peuvent pas jouer à de « vrais » jeux, mais uniquement à des sous-produits faits à la va-vite et sans intérêt.

Nouvelles images du plaisir

Durant bien des années, les adolescents ont pu comparer leurs machines et leurs jeux en glosant sur les détails esthétiques et sur les performances techniques.

Chaque génération de consoles proposait sa petite guerre pour déterminer laquelle serait la plus compétitive.

Lorsque Nintendo sort la Wii au moment où d’autres produisent des consoles next gen affichant des images en HD, nombreux sont ceux qui ont ri.

Ils ont également dénigré les publicités de la firme japonaise : fond blanc, personnages proposant un panel de tous les âges, tous les sexes, toutes les couleurs.

Les mises en scène montrent des familles idéales et des bandes d’amis, communiant dans le même plaisir de jouer. Tout cela est trop beau pour ne pas être suspect.

Les acteurs font semblant de jouer et ça se voit. Les gamers reprochent à ces publicités de ne pas refléter la gestuelle réelle.

En réalité, ils ont juste oublié que, cette fois-ci, les images ne leur étaient pas destinées.

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