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La mythologie japonaise dans Okami et Okamiden

La plupart des jeux vidéo reprennent des éléments folkloriques afin de créer des univers fictifs attractifs et immédiatement reconnaissables par les joueurs. Dans le cas des œuvres japonaises, il peut être plus difficile de savoir à quoi correspondent les légendes dont se sont inspirés les scénaristes ou game designers. Voici quelques exemples de références à la mythologie japonaise dans Okami et Okamiden, jeux vidéo de Capcom.

Amaterasu

C’est la déesse du Soleil, née d’Izanagi et Izanami, divinités sorties de l’océan huileux primitif. Amaterasu est née lorsqu’Izanami s’est lavé l’œil gauche pendant le premier rite de purification (« misogi ») qu’il a accompli après avoir été dans les Enfers afin de rechercher sa femme.

De l’œil droit est sortie Tsukiyomi, déesse de la Lune ; de son nez est issu Susano, dieu des Tempêtes. Amaterasu est la divinité principale du shinto et les empereurs japonais sont censés être des descendants de sa lignée.

Dans la série Okami, elle s’incarne en un loup blanc qui fait revivre la nature par le pouvoir de son Pinceau céleste. L’une des techniques permet de faire briller le soleil.

Amaterasu réside dans le « Takama-ga-hara », littéralement la « haute plaine du Paradis » – c’est d’ailleurs cette traduction littérale qui est utilisée dans la version anglaise d’Okamiden.

Dans ce même titre, elle envoie son enfant sur terre sous la forme d’un louveteau pour aider les humains. Il est nommé Chibiterasu, mot-valise composé de « Chibi » (« petit ») et « Amaterasu ».

Susano

Frère d’Amaterasu, Susano est né de la morve d’Izanagi. Turbulent, destructeur, il est notamment responsable de la fuite d’Amaterasu dans une caverne, plongeant ainsi le monde dans l’obscurité. 

Chassé du ciel, il vit parmi les hommes qu’il aide en terrassant un serpent à huit têtes et huit queues : Yamata no Orochi. Il sauve ainsi la princesse Kushi-Inada-Hime qui devait lui être offerte en sacrifice.

Pour cela, il fait boire au serpent des baquets remplis de saké. Une fois le démon endormi par l’alcool, Susano le terrasse plus facilement.

Dans la série Okami, on retrouve ce personnage sous les traits d’un humain au nez rouge. S’agit-il d’une allusion à son origine ? Il tue le serpent Orochi à la fin d’Okami afin de sauver Kushi.

Kuni, fils de Susano, est le premier partenaire de Chibiterasu dans Okamiden. Pour en savoir plus sur ce personnage, vous pouvez lire l’interview du scénariste d’Okamiden ici.

Kushi

La princesse Kushi-Inada-Hime est une divinité qui devait être offerte en sacrifice à Orochi. Son nom signifie « peigne ».

Susano la transforme d’ailleurs en cet accessoire capillaire pour la protéger lors du combat.

Dans la série Okami, elle prépare du saké comme dans la légende originelle pour endormir Orochi. Ses cheveux forment un peigne et elle porte de petits tonneaux sur sa coiffe.

Izanagi et Izanami

Izanagi et Izanami sont les deux divinités primordiales dans la mythologie shintoïste. Principe mâle et femelle, ils sont en quelque sorte frère et sœur tout en étant mari et femme.

De leur union ont été créées les différentes îles de l’archipel japonais. Dans la version anglaise, les noms sont abrégés en Nagi et Nami. Ancêtre de Susano, Nagi a battu Orochi 100 ans avant les événements d’Okami.

Orochi

Dans la mythologie shintoïste, le serpent à huit têtes Yamata no Orochi dévore chaque année les enfants d’un couple de divinités, Ashinazuchi et Shinmane.

Ils doivent sacrifier leur huitième enfant mais Susano les aide en tuant le monstre après l’avoir endormi avec de l’alcool.

Dans le corps d’Orochi, il trouve une épée (« Kusanagi ») qui fait ensuite partie des trois Trésors sacrés du Japon.

Ce mythe rappelle celui de l’Hydre de Lerne chez les Grecs et serait selon certains une métaphore de la progression de l’agriculture sur la nature sauvage, symbolisée par le serpent représentant les fleuves.

Dans Okami, Shiranui tue le serpent à huit têtes Orochi avec l’aide de Nagi. Mais si vous avez joué à ce titre ainsi qu’à Okamiden, vous savez que les choses sont un peu plus compliquées…

Orochi prête bien sûr son nom à des personnages de mangas connus comme Orochimaru de Naruto.

Trois Trésors sacrés

Le Miroir, le Joyau et l’Épée constituent les trois « Trésors sacrés » de la monarchie japonaise, Sanshu no Jingi. Donnés par les dieux, ils demeurent cachés à la vue des mortels et symbolisent l’origine divine de la famille impériale.

Dans la série Okami, Amaterasu et son enfant se servent de ces objets comme armes pour terrasser le Mal. Le disque enflammé est en fait le miroir, et le fouet correspond au Joyau dont la forme apparaît dans l’arme.

Cerisiers en fleurs

Pour les Chinois et les Japonais, les fleurs correspondent à des saisons et possèdent toutes des symboliques particulières. Le cerisier (« sakura ») est ainsi la fleur du printemps et les Japonais vont traditionnellement admirer les arbres en fleurs en avril (« hanami »).

Autrefois, le calendrier lunaire faisait débuter l’année au printemps. La fleur est ainsi le symbole de la renaissance après l’hiver. 

Dans la série Okami, le joueur doit faire fleurir les cerisiers pour revitaliser le pays et redonner la foi. Le cerisier géant est habité par un esprit nommé Sakuya. C’est le premier arbre sacré que l’on revitalise dans Okamiden.

Kami

Dans la conception shintoïste du monde, les Japonais considèrent que toute chose est un esprit. Le shinto est en effet une religion animiste dans laquelle le soleil et le serpent/dragon jouent un rôle primordial.

Les esprits ne sont jamais vraiment bons ou mauvais. Ils existent et les humains doivent apprendre à cohabiter avec eux.

Les histoires d’amour entre humains et esprits se terminent – presque – toujours mal, à cause de la curiosité des humains qui les pousse à ne pas respecter certains tabous.

Dans Okamiden, l’un des animaux que vous rencontrez vous demande ne pas monter à l’étage. Si vous le faites, il s’en va. Cela fait référence à l’une des nombreuses légendes où les animaux se transforment en humains.

Douze animaux célestes

Dans l’astrologie chinoise, chaque année correspond à un signe et à un animal : rat, buffle, tigre, lapin, dragon, serpent, cheval, chèvre, singe, coq, chien et cochon. Au Vietnam, le lapin est remplacé par le chat.

Ces douze animaux correspondent aux douze divinités qui aident Amaterasu dans Okami. Chaque signe apporte une technique différente pour le Pinceau céleste.

Dans Okamiden, ce sont les enfants de ces divinités qui aident Chibiterasu.

Dragon

Dans la mythologie chinoise, serpent et dragon appartiennent à la même famille et sont des divinités de l’Eau.

Selon une légende, une carpe serait parvenue à remonter le fleuve Jaune et se serait ensuite transformée en dragon.

L’un des boss d’Okamiden fait référence à cette légende. La carpe, comme le saumon, est en effet capable de remonter les cours d’eau. Elle est un symbole de la persévérance.

Momotaro

Dans le folklore japonais, Momotaro est un enfant né d’une pêche, envoyé par les cieux pour récompenser un couple ne pouvant avoir de descendance.

Héros capable de parler aux animaux, il est doté d’une grande force et terrasse les démons de sa région.

Dans Okamiden, il apparaît comme un personnage non joueur, dépité parce que personne ne s’intéresse à lui.

Tori

La séparation de l’espace en territoires sacrés et profanes est très importante dans la pensée religieuse japonaise. C’est pourquoi de nombreux signes existent pour rendre ces frontières manifestes.

Les « tori » en sont les plus connus. Ce sont des portiques sacrés placés à l’entrée des temples et parfois dans d’autres lieux saints.

Ils sont généralement composés de deux poutres horizontales, dont l’une est incurvée. Elles sont supportées par deux piliers.

Dans mythologie japonaise, les tori semblent commémorer l’aide que certains oiseaux, dont le coq, ont apportée aux dieux pour faire sortir Amaterasu de sa caverne – ce qui avait plongé le monde dans l’obscurité.

Gohei

Guirlande de papier pliée en zigzag qui délimite une enceinte sacrée, elle peut être blanche, or et argent ou de cinq couleurs. Elle entoure certaines pierres ainsi que les arbres dans la série Okami.

Oni

Ce sont les démons du folklore japonais. Dans le shinto, ils constituent des entités inférieures et plus démoniaques que les Kami : ce sont en quelque sorte des Kami sauvages (« araburu-kami »), des esprits malins (« mono-no-ke »), des êtres doués de pouvoirs magiques (« bakemono »).

Régulièrement confondus avec les spectres et revenants, les Oni apparaissent fréquemment dans les contes fantastiques inspirés des histoires de fantômes chinois très prisées au Japon.

Ils sont souvent représentés avec des cornes et des peaux de tigre en guise de vêtements.

Dans Okamiden, le joueur fait la connaissance des Oni responsables de la foudre et doit réussir un minijeu de rythme.

On retrouve ces personnages de la mythologie japonaise dans de nombreux dessins animés dont la vieille série Lamu.

Les Oni sont aussi les ennemis de base que l’on affronte tout au long de l’aventure. Ils portent tous un papier pour masquer leurs traits.

Lorsque Chibiterasu va au marché des démons, il doit lui aussi avoir un papier pour se cacher le visage afin de se faire passer pour un démon. Il affronte la reine des Oni à la tête disproportionnée et ornée de deux cornes.

Raijin

Divinité de la Foudre, dieu du tonnerre, Raijin est souvent représenté assis sur un nuage avec un tambour d’où sortent les éclairs. On le montre généralement avec Fujin, divinité du Vent.

Dans Okamiden, le joueur vole vers le nuage des divinités de la Foudre et reçoit un tambour qui le protège des éclairs. Il apparaît aussi sous le nom de Raiden et figure dans bien des jeux vidéo dont… Mortal Kombat !

Miko

Ce terme désigne les prêtresses du shintoïsme. On considère qu’elles peuvent entrer en contact avec le monde divin par le biais de danses et de transes. Elles peuvent accomplir des exorcismes.

Dans Okamiden, Kagu devient une apprentie Miko qui revêt l’habit traditionnel des prêtresses et brise les sceaux démoniaques.

Issun

Dans Okami, comme Amaterasu ne parle pas sous sa forme de loup blanc, les designers ont ajouter le personnage d’Issun afin d’interagir verbalement avec nous et le reste de l’univers en jeu.

C’est un peu la version masculine de Navi (fée verte un peu bavarde et parfois moqueuse) du Zelda : Ocarina of Time. Le personnage vient d’un conte japonais très connu (Issun-bôshi).

Un couple de paysans ne parvenant pas à avoir d’enfant implore les dieux qui leur en accordent un dont la particularité est d’être minuscule : il ne mesure pas plus qu’un pouce (d’où son nom « un pouce » en japonais).

Selon les versions, il part ou est chassé de chez lui et arrive à la capitale. Il parvient à sauver une princesse d’un ogre en attaquant celui-ci de l’intérieur de son estomac. Sa taille devient donc son principal avantage durant le combat.

L’ogre finit par le recracher et s’enfuir en laissant une arme magique permettant d’excuser des vœux. Issun l’utilise alors pour retrouver une taille humaine normale et épouse la princesse.

En jeu, une séquence permet de rétrécir Amaterasu, Issun ayant alors une taille « normale » par rapport au loup.

Tengu

Le  tengu désigne au Japon des divinités singulières qui s’apparentent aux mystérieuses divinités de la montagne qui sont l’objet de toutes sortes de croyances populaires.

Dans la mythologie japonaise, ils incarnent fondamentalement une de ces forces formidables que la nature recèle, inspirant à ce titre crainte et respect. Les légendes nous les décrivent ainsi comme des êtres redoutables qui aiment à troubler la paix des religieux venus méditer dans leur habitat désolé. 

Les tengu sont également réputés pour leur science éminente des arts militaires et selon les légendes, le grand Yoshitsune (le plus illustre héros du Japon) aurait appris le métier des armes sous la férule d’un grand tengu dans les profondeurs du mont Kurama.

Cet article ne vise pas l’exhaustivité dans les références à la mythologie japonaise mais je vous laisse avec ce détail. Le chapeau de ce personnage est un petit tengu ou karasutengu, (ou tengu corbeau). Pourvu d’un bec d’oiseau et d’un chapeau, on le considère comme un subalterne du daitengu, aisément reconnaissable à son long nez rectiligne et à sa face rubiconde

Article initialement paru dans IG magazine 13.

Le jeu Okami est disponible sur plusieurs formats dont une version HD pour :

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