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Qu’est-ce qui fait moccoli ? (bruitage et manga érotique)

Qu’est-ce qui fait mocoli, zuzu, dopiyu et nupo dans un manga ? Réponse avec les onomatopées liées à des références sexuelles

Curieusement, la première chose qu’on apprend dans une langue étrangère ce n’est pas ce qu’on nous enseigne en cours, mais les insultes qu’on entend dans les V.O. ! Fuck et shit en anglais ou baka en japonais. La seconde pourrait être les onomatopées lorsqu’on est lecteur de manga. Et dans ce cas, devinez ce qui fait moccoli, zuzu, dopiyu et nupo ?

La bande son d’un film de cul est assez caractéristique : dialogue plus ou moins débile avant une série de « prend moi », « oh oui », « encore », « bien profond » et ahhh » sur fond de musique décalée. En japonais, il y a bien sûr des équivalents à ces paroles stéréotypées : yamete « arrête », itte « ça fait mal », et iku « je viens ». Mais à cela s’ajoute toute une série de bruits de succion et autres matérialisés par des onomatopées.

On dit souvent que l’originalité de la langue japonaise réside dans les innombrables sons difficilement traduisibles en français. À ceux qui sont répertoriés dans les dictionnaires s’ajoutent ceux qui s’inventent tous les jours et ceux qui sont créés dans les manga. Tout peut virtuellement être une onomatopée, même le silence. D’ailleurs, en japonais, ça fait shiin. Les habitants du Pays du soleil levant distinguent aussi différents types de pluie selon le son des gouttes d’eau : shito shito pour une pluie fine,  ou dosha dosha lorsqu’elle est plus violente. Le soleil de plomb fait , les cheveux en pêtard bosa bosa, le regard scrutateur shige shige. À cette originalité liée aux termes auxquels on attribue un bruit s’ajoute le caractère singulier du son lui-même.

Mais vous nous direz qu’a priori les aboiements d’un chien en France ou au Japon sont identiques. Certes. Le problème est que lorsqu’on les transcrits le son est différent. En France un chien fait ouaf ouaf, tandis qu’en japonais il dit wan wan. Si l’on regarde dans d’autres pays, le problème est le même dans tous les pays. Le cocorico français devient kokekoko en japonais, cock-a-doodle doo en anglais, chicchirichi en italien, kukeluku en hollandais, etc. Cela est dû aux habitudes linguistiques de chaque pays. Certains sons paraissent insolites car ils n’existent pas dans toutes les langues. Ainsi les consonnes R et L sont difficiles à prononcer pour les Japonais qui souvent les confondent, d’où les transcriptions Rei ou LeiRanma ou Lanma

Il en est de même lors du passage du japonais au français. Certaines sonorités n’existent pas dans la langue et sont donc difficiles à retranscrire. Ainsi, il n’y a pas de voyelles longues en France et c’est pourquoi on les note avec des accents circonflexes ou des trémas. Face au même problème, les anglophones emploie une autre solution car ils ne connaissent pas l’utilisation des accents. Ils notent alors les voyelles longues du japonais par un –h (Yu-Gi-oh), un –w (Shirow), un –u (Touru) ou une double voyelle (Yuuki).

D’autre part, les consonnes peuvent être écrites de diverses manières. Est-ce moccoli, mocoli, mokkoli, mokoli ou encore moccori, moccori, mokkori, mokori ?

Quant aux Japonais, lorsqu’ils traduisent les termes anglais ou français, ils sont très gênés par l’absence de e muet dans leur langue qu’il remplace, par exemple, par les sons ru ou su. C’est pourquoi Comics devient komiksu et Versailles se transforme en Berusaayu. Les exemples de déformations sont nombreux et souvent assez comiques, surtout lorsqu’un terme anglais est retranscrit en japonais puis en français par des fans ne maîtrisant pas cette langue.

Ainsi, il est possible de voir le vermouth, alcool anglais, transcrit très approximativement par le son « bermuto » en japonais, et écrit tel quel dans la traduction anglaise du japonais.

Les manga regorgent de ces onomatopées plus ou moins curieuses pour un lecteur français. L’emploi de cette « bande son » est un autre des multiples héritages de Tezuka Osamu à la BD nippone. Pour une BD réputée pour son caractère très visuel, on ne peut être que surpris par la grande quantité de termes soulignant les sons. Ces bruits non seulement s’intègrent dans la continuité graphique de la page en dynamisant ou dramatisant certains moments clefs, mais ils apportent un sens qui s’ajoute à celui qui se dégage des paroles et des images. Le dessin de l’onomatopée est souvent traité de telle manière qu’il forme une partie de la représentation finale au point qu’on peut parfois se demander si c’est le son ou la matérialisation imagée de ce son qui importe.

Moccoli ! dit ce membre
Admirez le moccoli enthousiaste en image

Pour en revenir à la question initiale, ce qui fait moccoli, zuzu, dopiyu et nupo n’est autre qu’un sexe masculin lors d’une relation sexuelle dans une planche de manga. : érection, pénétration et va-et-vient, éjaculation et rétractation. Et si vous souhaitez que votre compagne ne reste pas de marbre, il faudra rajouter du munya munya et du shupa shupa pour obtenir du julu julu et du bikun [1].

On ne trouve pas systématiquement ces onomatopées, mais ils apparaissent régulièrement au détour des planches. D’ailleurs n’avez-vous pas réussi à reconnaître le son qui caractérise Ryô Saeba / Nicky Larson, le mocoli man par excellence. C’est sûrement plus cru que le « coucou » utilisé dans la traduction française du manga de Tsukasa Hôjô (City Hunter), mais pour un lecteur qui ne connaît pas le sens de moccoli, le son est des plus drôles. Quant au « ouin ouin » vert de la maîtresse d’Ebichu, vous vous doutez bien que c’est un accessoire des plus utiles lorsque son ami n’est pas là.

Comme autres curiosités, vous trouverez : biri biri pour la culotte qui se déchire, juju pour marquer l’humidité, mais aussi panpan, muru muru, kuchu kuchu, muchi muchi, poyon, nupu et susu, dont nous vous laissons imaginer les gestes correspondants. Si vous souhaitez en découvrir d’autres, vous pouvez vous procurer Extrême Orient chez les Humanoïdes associés. Dans ce recueil de manga érotiques, les onomatopées sont traduites en note en dehors des cases pour conserver la graphie originale. C’est aussi un bon exemple de différence d’emploi des bruits. Si la nouvelle 13 m2 regorge de sons exotiques pour les oreilles occidentales, Programme de santé publique n’en présente guère.

Parmi tous ces sons liés aux organes génitaux doku [2] nous est particulièrement cher. Mais il est en général suivi de cris de douleurs stridents.

Pour un aperçu plus sérieux sur les onomatopées dans le manga, allez plutôt là 😉


Article initialement publié dans AnimeLand.


[1] Caresse des tétons, succion du sein, sécrétion de liquide lubrifiant, spasmes

[2] Coup de pied dans les testicules

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