Si le premier chapitre de One Piece ou de My Hero Academia sont percutants, celui de Naruto est moins épique. Mais il présente un héros plus attachant. Voici comment débute sa quête pour devenir le plus puissant des ninjas.
Comme beaucoup de personnage de shônen manga, le jeune Naruto Uzumaki est un peu naïf et se fait trop remarquer aux goûts de son entourage. Dans les premières pages, il est puni pour avoir taggé les sculptures des anciens Hokage, chefs de Konoha, village de ninjas.
Lorsque son maître Iruka lui demande de créer un clone à son image, Naruto se transforme en joli femme nue. La plaisanterie lui vaut de nouvelles réprimandes.
Chahuteur et mauvais élève, Naruto est le seul à ne pas réussir l’examen pour être considéré comme adulte et avoir le droit de porter le bandeau frontal avec le symbole du village.
L’idiot du village
Naruto n’est pas le premier héros présenté comme un élément perturbateur. Par sa naïveté et sa force, Son Goku casse tout et n’agit pas selon les normes dans le premier volume de Dragon Ball.
Le héros de Slam Dunk est un voyou qui s’inscrit à un club de basket-ball pour impressionner une fille. Dans Yū Yū Hakusho, Yusuke Urameshi est également présenté comme un vaurien naïf. Il meurt en sauvant un enfant et devient alors un détective du monde des esprits.
Dans Naruto, le côté un peu canaille va de pair avec la conviction qu’il peut devenir le futur maître du village. On pourrait croire qu’il a l’assurance des idiots qui ne se rendent pas compte des dangers ou des difficultés.
Mais contrairement aux autres héros de shônen manga, le caractère bravache de Naruto est immédiatement expliqué par des éléments d’ordre psychologique. Le héros est d’autant plus fanfaron qu’il est isolé, non intégré au village.
Les premières pages du manga soulignent la solitude de Naruto. Orphelin recherchant l’attention des adultes et de ses camarades, il fait constamment le clown. Mais rien ne peut vraiment remplacer l’affection de vrais parents.
Cela est mis en valeur par son échec à l’examen. Tandis que les autres élèves se réjouissent et parlent de la manière dont leurs parents manifestent leur fierté, Naruto reste dans son coin.
Il n’a personne à qui se confier ou le rassurer. Plus encore, les murmures des adultes indiquent un certain mépris pour l’orphelin.
Tout ceci explique pourquoi Naruto fait confiance à Mizuki, collègue de maître Iruka qui a montré un peu de sympathie lors de l’examen.
Mizuki le persuade qu’il peut avoir son diplôme s’il apprend l’une des techniques contenues dans le Rouleau des Techniques Interdites.
Naruto vole alors le rouleau et s’endort après avoir appris la technique du Multi Clonage.
Évidemment, Mizuki considère Naruto comme un idiot facile à manipuler. Il tente de le persuader qu’Iruka le déteste. C’est pourquoi il serait si sévère avec lui.
La règle d’or
Après 32 pages mettant en scène un garnement d’apparence stupide, la cause de son rejet est révélée. Il y a 12 ans de cela, un démon renard a envahi le village et beaucoup sont morts en luttant contre lui. Parmi les ninjas tombés au combat figurent les parents d’Iruka.
Ce démon renard a été scellé dans le corps de Naruto qui n’était alors qu’un bébé. Selon Mizuki, Iruka ne peut que mépriser Naruto, désirer en secret sa mort pour se venger du démon.
Naruto est en colère, mais il ne semble pas être en mesure de lutter contre Mizuki qui veut le tuer pour récupérer le Rouleau des Techniques Interdites.
Il est sauvé de justesse par son maître. Bien que très strict en cours, Iruka aime beaucoup Naruto.
En fait, il comprend parfaitement la situation de l’adolescent car lui-même a perdu ses parents. C’est pourquoi il l’invitait régulièrement à manger des nouilles pour l’encourager.
En tant qu’orphelin Iruka connait les motivations de Naruto. Il a lui aussi été extrêmement fanfaron dans sa jeunesse pour susciter l’attention des autres. Au lieu de chercher à nuire à Naruto, il applique la règle d’or : ne fait pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse.
Il ne veut donc pas se venger : son attitude stricte est en réalité celle d’un père exigeant envers son fils. Et c’est en tant que maître qu’il s’excuse de ne pas avoir été à la hauteur du rôle paternel.
A la règle de réciprocité au cœur de toutes les morales, s’ajoute un lien émotionnel entre les deux orphelins. Comprenant enfin la situation, Naruto surmonte sa peur et se dresse devant l’ennemi pour défendre son père spirituel.
Il utilise la technique qu’il a apprise pour le protéger. Non seulement il parvient à créer un clone et à le faire combattre, mais il produit une armée qui submerge Mizuki.
Naruto surpasse ainsi les exigences de son maître pour passer l’examen.
Dialogue intérieur
La principale nouveauté de Naruto ne réside pas dans sa mise en page ou sa manière de débuter la quête du héros. Ce premier chapitre est même un peu mou comparativement à l’incipit d’autres séries.
L’élément vraiment innovant, c’est la mise en scène de la psychologie du héros. Ceci est d’autant plus clair lorsque l’on compare Naruto à Dragon Ball (1984-1995), série qui a grandement influencé l’auteur, Masashi Kishimoto.
Dans le manga d’Akira Toriyama, il est impossible de savoir ce qui motive le héros Son Goku. Celui-ci est un orphelin qui a tué son « grand-père » adoptif sans le vouloir, puis a été obligé de tuer son propre frère. Mais Toriyama ne s’attarde jamais sur les émotions de Goku.
Par la suite ses actions manquent de faire disparaître l’univers. Est-il vraiment débile ? A-t-il un plan préparé à l’avance qu’il cache sous des airs innocents ?
Le lecteur n’a jamais de réponse directe à ce type de question car l’important est de montrer le héros en action. Les conjectures et bribes d’explication sont élaborées par les personnages témoins qui regardent et commentent le combat.
Dans Naruto, en faisant d’Iruka un double plus âgé du héros et en montrant les pensées du maître, Masashi Kishimoto nous fait comprendre ce qui motive les actions d’apparence stupides de l’adolescent.
En plus clair, tous les récits épiques posent la même question : comment trouver les ressources pour surmonter les difficultés et les tragédies ? La réponse courte est : ne pas jouer la victime.
Lorsque tout semble être ligué contre vous, la seule solution est de prendre ses responsabilités pour surmonter le chaos intérieur ou extérieur. La rigueur d’Iruka envers Naruto est celle qu’il aurait souhaité voir son père appliquer lorsqu’il dévie de la voie des ninjas.
Il est sévère car il veut que l’adolescent endosse la pleine responsabilité de ses actes et ses conséquences (prévues ou imprévues).
De son côté, Naruto est également présenté avec son dialogue intérieur. Contrairement à Goku qui reste en quelque sorte « opaque », l’adolescent de Masashi Kishimoto éprouve des doutes.
Mais la relation de pitié filiale entre Naruto et Iruka permet aux deux personnages de surmonter le danger et vaincre l’ennemi.
A la fin du chapitre, Naruto reçoit le bandeau qui signale son passage à l’âge adulte de la main d’Iruka. Il a réussi son rite de passage et les deux hommes peuvent aller tranquillement manger des ramens.
Par la suite, de nombreux personnages d’orphelins présentent des variations sur ce même thème. Gaara est lui aussi l’hôte d’un démon.
Mais il n’a pas eu de guide comme Naruto. Il dirige sa rage contre tous ceux qu’il considère être ses ennemis avant de rencontrer le héros et changer de voie.
Naruto devenant de plus en plus puissant, Iruka est remplacé par d’autres figures paternelles qui entraînent le héros physiquement et mentalement : Kakashi Hatake, Jiraya.
Enfin, de même qu’Iruka veut protéger Naruto en le traitant comme un fils, Naruto veut aider son ami Sasuke Uchiha. Cette quête entraîne les deux personnages vers une suite de combats de plus en plus dramatiques. Mais ceci est un autre article.
Les images ont été prises à partir de la version anglaise de Naruto. Pour la version française, voir l’édition chez Kana.
Naruto (ナルト) est un manga créé par Masashi Kishimoto et initialement publié dans l’hebdomadaire Weekly Shônen Jump en 1999. La version française est publiée chez Kana. Après 72 volumes, la série d’arrête en 2014.
Mais l’univers de fiction perdure à travers les nombreuses adaptations sur quasiment tous les médias, dont la série de manga Boruto: Naruto Next Generations (en cours de publication depuis 2016). Là encore, la version française est chez Kana.
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À lire :
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